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Robert Mascarell

croit plus que jamais à l'existence, prouvable, de la lutte des classes, qu'à celle, improuvable, de dieu

Perspectives économiques selon Christian Saint-Etienne

Coût de la crise financière et perspectives économiques 2009-2010

Par christian saint-étienne le mardi, décembre 23 2008, 13:00 - Articles

La crise financière s’est progressivement transformée en menace globale sur la prospérité du monde depuis la faillite de Lehman Brothers le 15 septembre 2008, ce qui a progressivement conduit au grippage complet du marché monétaire entre banques, entre le 17 septembre et le 10 octobre 2008. Le monde est alors passé près d’une catastrophe d’ampleur thermonucléaire. Si les gouvernements occidentaux n’étaient pas parvenus à faire partiellement redémarrer le marché monétaire mondial, après leurs interventions des 12-15 octobre, une conflagration peut-être plus destructrice que la crise de 1929 devenait envisageable. Dans cette occurrence, on pouvait imaginer deux à trois millions de chômeurs de plus pour la seule France avant fin 2009, alors que la France n’aurait pas été le pays le plus touché en Europe. Les causes potentielles de la crise sont désormais connues : très forte création de liquidités mondiales après l’éclatement de la bulle Internet, dans un contexte où la sous-évaluation de certaines monnaies asiatiques conduit à une accumulation délirante des réserves de change qui accélère la création monétaire globale ; normes comptables qui supposent l’existence d’un marché liquide et qui deviennent destructrices lorsqu’il n’y a plus de marché ; normes prudentielles qui dissuadent les banques et assurances de détenir des actions à long terme ; enfin, existence de marchés de gré à gré de produits dérivés qui se sont transformés en bombes nucléaires après la faillite de Lehman. Chacune de ces causes, séparément, n’aurait pas produit de catastrophe. C’est leur combinaison qui était dangereuse, ce qu’on pourrait appeler un effet AZF, soit l’explosion d’un système après la rencontre fortuite (ou voulue) de composants inertes séparément mais destructeurs lorsqu’ils se combinent. Il y a deux mèches qui ont fait exploser la poudre : une mèche lente : la crise des subprimes qui a affaibli les banques en menaçant leur liquidité, puis leur solvabilité ; une mèche rapide, qui a été le déclencheur final : la faillite de Lehman Brothers le 15 septembre 2008. Il reste à expliquer comment cette décision a été prise. Ben Bernanke le 15 octobre, puis Henry Paulson le 23 octobre ont déclaré que le Trésor « n’avait pas l’autorité », avant l’adoption du plan Paulson le 3 octobre, pour sauver Lehman le 15 septembre précédent, car Lehman n’avait plus assez d’actifs collatéraux pour obtenir des prêts. Apparemment, il n’a pas été envisagé de « nationaliser » temporairement Lehman à ce moment là. L’histoire retiendra que ce sont les Européens, conduits par Sarkozy et Brown, qui ont trouvé la bonne réponse les 12 et 13 octobre par un plan massif de 1 700 milliards d’euros d’interventions en capital et en garanties. Les Américains suivaient le 14 octobre en adoptant le même mix d’interventions (250 milliards de dollars en apports de capitaux et 450 milliards en garanties). La Banque centrale européenne parachevait la construction en autorisant des prises en garanties supplémentaires de 1 700 milliards d’euros le 15 octobre, soit plus du doublement de l’assiette potentielle de refinancement. En attendant que les banques remboursent en 2010-2011 ce qu’on leur prête, le coût notionnel pour les finances publiques des pays industriels d’ici la fin de 2009 peut être estimé à 4 200 milliards de dollars (ensemble de l’OCDE), dont 800 milliards en apports de capitaux et 3 400 milliards de dollars en garanties. Hors effondrement économique mondial (qui mettrait en risque les garanties données), les Etats de l’OCDE concernés pourraient enregistrer un gain annuel, jusqu’au remboursement des fonds prêtés ou revente des participations, net des coûts de financement, de 20 milliards de dollars sur les seuls apports en capitaux. Il n’y a donc pas de cadeaux aux banques. Les plus-values à la revente des participations pourraient être de plusieurs dizaines de milliards de dollars au bénéfice des Etats qui se seront révélés dans cette affaire de fins spéculateurs sur le dos des banques aux abois et pour le plus grand profit des contribuables. Qui plus est, il ne s’agissait pas de sauver les banques mais d’éviter une implosion de l’économie mondiale qui aurait rapidement porté le taux de chômage dans les pays industriels à plus de 15%. Justement, où en est la crise financière et qu’attendre pour l’économie réelle ? Le pic de la crise financière est probablement passé mais la crise financière durera jusqu’à fin 2009 compte tenu de l’affaiblissement de l’économie réelle. La perte, liée à la crise globale, pour les banques des pays industriels en 2008-2009 pourrait atteindre 1 400 milliards de dollars après impôts. Elles pourraient bénéficier de 1 600 milliards de dollars d’apports de capitaux (initialement moitié privés – moitié publics), sachant que les banques ont déjà levé plus de 600 milliards sur les marchés. Si l’économie mondiale repart doucement à partir du printemps 2009, elles pourront lever 600 milliards de dollars de plus, ce qui leur permettra de rembourser rapidement la moitié des capitaux publics qui sont facturés très cher. Les banques seront mieux capitalisées mais moins profitables après la crise qu’avant, compte tenu du ralentissement de l’économie mondiale et du coût élevé des capitaux apportés. Elles seront de plus beaucoup plus régulées. Le plus urgent est de les obliger à garder dans leurs livres 20% des crédits titrisés et de forcer la cotation des dérivés sur des marchés organisés avec chambre de compensation, seules les banques obéissant à ces règles bénéficiant d’une garantie publique illimitée. La crise réelle sera sévère. Deux scénarios sont envisageables. Si les prix du pétrole et des matières premières restent au niveau de fin octobre 2008, la croissance mondiale pourrait repartir au printemps 2009 et s’accélérer doucement ensuite, la zone euro suivant avec retard le train américain. Mais le dernier trimestre 2008 et le premier trimestre 2009 vont être désagréables à traverser. Si ce scénario se vérifie, d’énormes plus-values seront réalisées par les investisseurs les plus sagaces par rapport à des prix d’actifs ridiculement bas. A l’inverse, si les prix des matières premières repartaient fortement à la hausse, le redémarrage mondial serait plus lent. En ce qui concerne la zone euro, dans un scénario avec un euro à 1,3 dollar et des prix de matières premières raisonnables, le redémarrage commence doucement à l’été 2009. Si l’euro et les matières premières remontent, les années 2009-2010 seraient pénibles. Le pire de la crise de l’économie réelle est donc devant nous, d’ici Pâques. L’Etat, s’il est économe et stratège, comme dans le traitement de la crise financière, pourra limiter la perte des emplois marchands. Alors, le taux de chômage augmenterait de moins de 2 point de pourcentage. Le déficit public serait contenu à 4% du PIB en 2009. Ceux qui ont compris ce qui s’est réellement passé entre le 15 septembre et le 15 octobre 2008 diront que c’est un triomphe de l’intelligence. Il sera facile, pour les autres, de tout critiquer. Christian Saint-Etienne

MA REPONSE

Le dimanche, mars 15 2009, 00:27 par Mascarell Robert

Monsieur,

Décidément, votre analyse prospective du 23 décembre 2008 est aussi fiable que celle que vous avez faite dans votre article du 3 mars 2008, intitulée « Pourquoi réformer ? ».

Je me fais un plaisir et un devoir de rappeler ce que vous écriviez dans cet article (je le reproduis à la suite de ma réponse) : « Ces réformes doivent être absolument mises en œuvre (en France – RM) dans les dix-huit mois qui viennent, dernière fenêtre de tir pouvant obéir à la raison dans le cadre d’un dialogue social intégrant l’urgence de l’ajustement, avant le grand krach économique et social qui nous menace. C’est d’autant plus nécessaire, qu’en dépit d’un premier semestre 2008 qui va nous apporter beaucoup de mauvaises nouvelles, le doublement en cinq ans de la classe moyenne mondiale laisse présager une forte reprise (dans le monde – RM) commençant à l’automne 2008 et se déployant en 2009. »

J'ajoute que vous avez écrit cet article, alors que la crise des subprimes a commencé à faire sentir ses effets en juillet 2007

Votre article du 23 décembre 2008 se veut prospectif pour 2009-2010.

Vous commencez très fort, en écrivant : « Le pic de la crise financière est probablement passé mais la crise financière durera jusqu’à fin 2009. »

Puis, prudemment, vous proposez deux scénarios. Il se trouve que votre premier scénario présuppose que les prix du pétrole et des matières premières restent au niveau de fin octobre 2008. C’est à peu près le cas, en ce 15 mars 2009. Leurs prix sont mêmes inférieurs. Et là, dites-vous « …..la croissance mondiale pourrait repartir au printemps 2009 et s’accélérer doucement ensuite, la zone euro suivant avec retard le train américain….. ». Pour que ce scénario se réalise, vous supposez un euro à 1,30 dollar. En ce 15 mars 2009, l’euro est à 1,29315.

Toutes les conditions sont donc réalisées pour qu’advienne votre scénario. Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est loupé.

Dans la même veine, vous estimez le déficit public à 4 %. Dommage ! Il sera plus près de 6 %.

Manifestement, contrairement à ce que vous dites, vous n’avez rien compris à ce qui s’est passé entre le 15 septembre et le 15 octobre 2008. Puisque, pour vous, la crise est circonscrite entre ces deux dates. Mais où est donc le « triomphe de l’intelligence » dont vous vous targuez ?

Si vous aviez compris cette crise, vous sauriez que le capitalisme est plongé dans une crise systémique mondiale. Les mois qui viennent promettent d’être très sportifs. Surtout dans l’antre du système que vous chérissez : Etats-Unis et Grande Bretagne, mais partout par effet de dominos.

Il est vrai que, pour vous, reconnaître cela, ce serait l’aveu de l’échec de toutes vos thèses. Et ça, vous ne pouvez vous y résoudre. Mais ne vous en faites pas, la maladie psychologique qui consiste à s’obstiner dans l’erreur se soigne très bien avec un peu d’honnêteté intellectuelle.

Une inquiétude me gagne, à force de vous tromper et, plus grave, de tromper ceux qui vous lisent et vous écoutent, ne craignez-vous pas que vos propres collègues du Conseil d’analyses économiques en viennent à douter de votre compétence ? A moins qu’ils ne soient dans le même état de torpeur que vous.

Pourquoi réformer ?

Par christian saint-étienne le lundi, mars 3 2008, 14:40 - Articles

• France

Le problème économique fondamental de la France n’est pas lié à une insuffisance de demande, mais à une faiblesse de l’offre compétitive qui se traduit par des pertes massives de parts de marché de nos entreprises à l’exportation et sur le marché intérieur : les produits et services français ne sont pas adaptés à la vive demande en France et dans le monde. Quelles sont nos insuffisances ? Le développement de l’économie française est freiné depuis une vingtaine d’années par plusieurs caractéristiques nationales : - C’est une économie capitaliste sans capitalistes. La France compte moins d’investisseurs à long terme et de capital-risqueurs que ses concurrents les plus dynamiques. - L’organisation institutionnelle et sociale du pays fait peser de lourdes charges sur les PME qui se heurtent à un « plafond de verre » aux alentours de 70 salariés, en sorte que nous avons deux fois moins d’entreprises ayant de 100 à 1000 salariés que les Allemands. La France ne dispose pas du tissu de grosses PME à même d’investir dans la recherche et développement (R&D) de nouveaux produits et dans la conquête des marchés étrangers, ce qui explique largement nos piètres performances en R&D et à l’exportation. - L’essentiel de la protection sociale reste financé par des charges salariales qui gênent le développement de l’emploi. - La fiscalité sur les facteurs mobiles de production est deux fois plus lourde que dans les autres pays européens. Les facteurs mobiles de production (capital et travail) sont sensibles aux quatre impôts clés qui conditionnent les décisions d’implantation : impôt sur les sociétés (IS), fiscalité sur l’épargne, taux marginal de l’impôt sur le revenu et impôt sur la fortune (ISF). Or, pour ces quatre impôts, la France affiche des taux d’imposition pratiquement doubles de ceux de ses concurrents, et maintient un ISF au moment où les derniers pays européens frappant la richesse (Suède et Espagne) suppriment le leur. La France a donc un besoin urgent de réformes pour augmenter sa compétitivité et son investissement productif, favoriser l’essor de ses PME, accroître son effort d’innovation, modifier le financement de sa protection sociale dans un sens plus favorable à la croissance et à la multiplication des emplois. La réforme fiscale, à condition d’être équitable, est un impératif absolu pour asseoir le développement national. L’orientation des réformes nécessaires est maintenant bien connue grâce aux nombreux rapports du Conseil d’Analyse Economique, complétés par le rapport Attali et d’autres propositions faites par quelques députés entreprenants. Ces réformes doivent être absolument mises en œuvre dans les dix-huit mois qui viennent, dernière fenêtre de tir pouvant obéir à la raison dans le cadre d’un dialogue social intégrant l’urgence de l’ajustement, avant le grand krach économique et social qui nous menace. C’est d’autant plus nécessaire, qu’en dépit d’un premier semestre 2008 qui va nous apporter beaucoup de mauvaises nouvelles, le doublement en cinq ans de la classe moyenne mondiale laisse présager une forte reprise commençant à l’automne 2008 et se déployant en 2009. Christian Saint-Etienne

février 12 2009, 23:04 par Robert Mascarell

Le 12 février 2009, j'ai suivi, sur le site franceinter.fr, votre débat face à Monsieur Emmanuel Todd. Je vous y ai vu tellement en fureur que je me suis dit que vous manquiez singulièrement d'assurance. Pourquoi ? me suis-je demandé.

M'est alors venue l'idée d'aller sur votre site pour y lire ce que vous aviez écrit ces dernières années. Je suis loin d'avoir tout lu, mais très vite je suis tombé sur de véritables perles, qui m'en ont beaucoup appris sur la qualité de vos analyses prospectives.

Pour illustrer mon propos, je soumets à votre sagacité cette citation, tirée de votre article intitulé "Pourquoi réformer ?" : "Ces réformes (en France -RM) doivent être absolument mises en œuvre dans les dix-huit mois qui viennent, dernière fenêtre de tir pouvant obéir à la raison dans le cadre d’un dialogue social intégrant l’urgence de l’ajustement, avant le grand krach économique et social qui nous menace. C’est d’autant plus nécessaire, qu’en dépit d’un premier semestre 2008 qui va nous apporter beaucoup de mauvaises nouvelles, le doublement en cinq ans de la classe moyenne mondiale laisse présager une forte reprise (dans le monde -RM) commençant à l’automne 2008 et se déployant en 2009."

J'ajoute que vous avez écrit cet article, alors que la crise des subprimes a commencé à faire sentir ses effets en juillet 2007, et que depuis bien avant encore, on peut lire sur le site europe2020.org, que le système capitaliste est engagé dans une crise systémique globale, ayant pour épicentre les Etats-Unis. Pays dans lequel vous avez vécu six ans.

A la lumière de cette citation édifiante, je comprends mieux pourquoi Monsieur Todd a prôné, au cours de ce débat, la suppression du Conseil d'analyse économique, dont vous êtes membre. Après tout, cela irait dans le sens de ce que vous théorisez, l'allègement des dépenses publiques.

Je ne doute pas que vous saurez oublier vos intérêts personnels, pour mettre vos actes en accord avec vos paroles.

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